Ton’s speech bij zijn benoeming tot Chevalier du Tastevin
Clos de Vougeot, le 14ième Avril 2018.
Vos Excellences Monsieur le Grand Maître, Membres du Grand Conseil de la Confrérie,
Evidemment, je suis très honoré que vous venez de m’intrôniser.
C’est avec fierté que je porterai les insignes de votre Confrérie – le cordon pourpre et or aux couleurs des vins de votre région et le symbôle de l’outil de travail du vigneron, le tastevin d’argent.
Mon épouse et moi, nous séjournons avec beaucoup de plaisir dans votre pays, un pays que nous traversons depuis des années pour jouir de la convivialité française et de votre gastronomie.
Notre passion pour la gastronomie française qui d’ailleurs est visiblement plus crédible chez moi qu’en voyant ma femme … mais c’est quand-même une passion partagée.
Nous chérissons une même passion pour vos vins. Il y a une douzaine d’années, nous avons commencé d’emmener des cartons depuis la Bourgogne pour nos amis néerlandais. Maintenant, depuis que j’ai arrêté mon travail en tant que député, ce passe-temps s’est transformé en un travail quasi-sérieux en vendant quelque 10 mille bouteilles par an.
Dans cette semaine spéciale, nous allons profiter de notre séjour ici pour rendre visite á des amis-vignerons depuis des années dans des châteaux á Gevrey-Chambertin, Pernand-Vergelesses, Corgoloin, Échevronne …
Bien qu’en moins d’une journée on conduit de Pays-Bas en France, les différences culturelles entre nos pays sont assez grandes. Maintes fois, nous nous sommes posés la question : Qu’est-ce que l’esprit français ? Qui est le Français moyen ? Est-il revêche et arrogant ? Se conduit-il comme un grossier personnage ? Comme le ressent le Néerlandais qui arrête, sans vergogne, sa caravane devant la boulangerie pour n’acheter qu’une seule baguette et la déposer ensuite dans sa caravane qui regorge de provisions emportées de la maison ? Comme les pommes de terre et même du camembert en boîte en métal ?
Ou bien « le » Français est-il justement ce maire si obligeant et aimable de notre petit village, qui n’hésite pas à nous proposer de nous chercher de l’aéroport à notre arrivée, alors que l’aéroport se trouve seulement à une heure et demie de voiture ? Je ne connais vraiment pas de maire néerlandais qui nous faisait une proposition pareille.
Et, pour être clair : moi-même, je me rends régulièrement en France et sachez que je n’ai pas de caravane et que je n’emporte pas mes pommes de terre !
Revenons huit ans en arrière, je devais décrire un week-end de rêve dans un journal Néerlandais. En ce qui me concerne, un tel week-end commence à Paris. Ma femme et moi flânons dans les rues de la ville, moi-même chargé comme un baudet et marchant derrière elle dans la Rue du Faubourg Saint-Honoré – vous voyez un peu le tableau….
Nous finissons dans un bistrot de la taille d’un mouchoir de poche, il faut vraiment savoir se faufiler entre les tables qui sont si serrées les unes contre les autres, que même un actuaire introverti se voit obligé de parler avec son voisin de table.
Nous engageons la conversation avec le voisin de table d’un côté, un marquis tiré à quatre épingles, actif comme banquier privé – c’était une occupation très honorable à l’époque – et avec le voisin de table de l’autre côté, un électricien vêtu de son bleu de travail.
Avec ces voisins de table nous avons beaucoup parlé des différentes régions du pays.
Il est fascinant, pour nous Néerlandais, de constater à ce moment-là, donc dès qu’il est question de boire et manger, que toutes les différences de classe socialedisparaissent entre les Français. Et le fait qu’ils savent vraiment bien tout ce qu’il y a dans leur beau pays et où le trouver. C’est vraiment beau à voir, d’après moi.
Il y a aussi cette fierté pure, disons ce patriotisme que nous, Néerlandais, ne connaissons pas ou pas assez.
Monsieur le Conseiller d’Honneur, xyz, permettez-moi, après ma petite recherche de l’esprit français, je tiens à souligner que nous ressentons un grand plaisir d’avoir notre résidence secondaire ici ainsi que nous jouissons infiniment de nos pèlerinages de vin dans votre beau pays.
J’ai souligné quelques différences entre les Français et les Néerlandais. Mais il y a aussi des analogies.
Des analogies qui trouvent leur origine dans notre histoire politique commune qui date de l’époque des Lumières au 18ème siècle. Les philosophes français comme Descartes, Voltaire et Diderot ont voyagé et ont habité quelque temps aux Pays-Bas. La séparation de l’église et de l’état (la laïcité) fut inspirée de l’œuvre du philosophe néerlandais Spinoza.
Voltaire se rendit même quatre fois aux Pays-Bas au cours de sa vie, et c’est vraiment beaucoup pour une époque où l’on n’avait pas encore inventé l’avion ni la coöpération entre Air France et KLM !!
Une petite anecdote : Voltaire est venu pour la première fois à La Haye alors qu’il n’avait que 19 ans. Son père lui avait trouvé un emploi de secrétaire à l’ambassade de France, paraît-il, pour qu’il mûrisse et devienne adulte. Voltaire profite à fond de sa liberté nouvellement acquise.
Mais après une affaire amoureuse, il vaut mieux qu’il quitte La Haye au plus vite. Il est renvoyé à Paris avec ces mots « Poète et amoureux, donc fou par deux fois. ».
Mais disons simplement qu’il s’agissait là d’un petit cas typique de
joie de vivre française.
Nous, Néerlandais, je repète, nous voyons toujours cela avec une certaine admiration.
D’après moi, en tant que Néerlandais, nous devons approfondir notre connaissance du français et mieux connaître les Français. Quelques anciens ministres néerlandais de l’environnement (Milieuministers en Néerlandais), comme ministre Vorrink dans les années soixante-dix, ministre Alders dans les années quatre-vingt-dix et ministre Cramer il y a de cela une dizaine d’années, se sont présentés en France comme étant Ministre du ……. Milieu aux Pays-Bas ! (…minister van de van de onderwereld, alle drie !)
Pas très ingénieux de leur part… !
Tous trois socialistes d’ailleurs …
Une femme politique néerlandaise a dit une fois : « La France est un pays magnifique, dommage seulement que les Français y habitent. »
Je tiens absolument aujourd’hui en toute sincérité, à me distancier de ces propos et je suis convaincu que beaucoup parmi vous partagent et appuient mon avis.
Si, il va sans dire que j’affirme et soutiens que la France est un très beau pays.
Mais les Français sont aimables et chaleureux, à condition bien entendu de connaître et d’apprécier un peu leur savoir-vivre, leur âme, leur esprit.
N’est-ce pas Victor Hugo qui a dit que ‘le vin des forts est le poison des faibles …
Si je regarde autour de moi ce soir, pas de personnes faibles …
Et, c’est avec ce message sincère que j’aimerais terminer mon petit discours, c’est idéalement cela ce qui se passe ici ce soir même : le savoir-vivre, au coeur duquel je ressens votre engagement fameux pour vos vins bourguignons aussi fameux !